Le confinement est arrivé avec son lot d’interdits, de questions, d’incertitudes.
Comment est-il possible dans la société actuelle d’en arriver là ? De ne pas pouvoir éradiquer ce virus ? ça m’interroge sur la société d’aujourd’hui…
Et comment continuer à exercer mon métier d’éduc ? Mon rôle c’est d’être en contact quotidien avec des enfants, des jeunes sur l’accompagnement à la scolarité mais aussi leur proposer des actions pour qu’ils puissent s’épanouir, les accompagner, discuter avec eux, les rassurer, leur donner la chaleur qu’ils ne trouvent pas toujours ailleurs, essayer de leur montrer le positif qu’ils ont en eux, essayer de faire qu’ils soient mieux dans leur peau. Le confinement rend mon travail compliqué, comment rester en lien quand on ne peut plus se rencontrer ?
Au début, j’ai poursuivi le soutien scolaire en visio avec certains collégiens qui pouvaient avoir des difficultés mais pas trop, pour ne pas qu’ils se déconnectent complètement de l’école, pour garder un lien, pour qu’ils gardent une méthode de travail. Mais au fil du temps, ça s’est effiloché. Ils se sentent en vacances, ça a été de plus en plus dur de les mobiliser. Maintenant, ils ne répondent même plus. Sans contact physique, c’est à leur bon vouloir. Et je ne parle pas de ceux qui n’ont pas d’ordinateurs chez eux…
Avec certains collégiens, je passe par mon fils qui est aussi au collège, j’essaie de garder le contact, j’appelle. J’habite près de mon lieu de travail alors je profite aussi des sorties autorisées pour aller vers certains jeunes en particulier les 16/18 qui venaient plusieurs fois par semaine au lieu rencontre, je prends des nouvelles mais je vois bien qu’eux aussi ont décroché.
Je m’inquiète de la suite, comment va-t-on raccrocher ces jeunes ?
A la maison avec ma femme et mes 2 fils de 18 et 11 ans, et ma fille de 16 ans, on est parvenu à créer une forme d’harmonie grâce à ce confinement. Ils sont plus attentifs, plus respectueux des règles définies ensemble. On a mis en place une nouvelle organisation temps en famille /temps personnel, pour l’ordinateur et l’imprimante pour les devoirs, la playstation… Il y a plus d’entraide. Ma fille aide davantage ma femme pour les repas et son petit frère pour les devoirs, mon fils aîné m’aide sur des petits travaux… Il y a plus de solidarité, ils ont pris conscience de ce qu’ils pouvaient faire pour aider. Ils sont plus présents aussi à la maison, avant chacun avait ses activités, on se voyait beaucoup moins, on retrouve des espaces d’échange. Nos relations ont changé, on s’est rapproché et je pense que ça va se poursuivre après le déconfinement. Là c’est le Ramadan, on casse le jeûne ensemble, les autres années ça n’était possible que le week-end avec nos horaires différents.
Je lis, je cherche comment gérer les ados en période de confinement. C’est aussi l’occasion de discuter avec mon épouse qui serait plus stricte que moi, elle dit toujours que je suis trop cool ! Les ados d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier et ce qu’on vit est inédit. Les copains, la vie de groupe leur manque. Il faut trouver des compromis.
Avec mon épouse, on parle aussi du 11 mai. On ne se sent pas rassuré, elle encore moins que moi. Si ça ne tenait qu’à elle, elle n’enverrait pas tout de suite le petit dernier au collège. On sait par nos amis qui bossent à l’hôpital qu’ici le pic reste élevé. Est- ce que ce sera suffisamment sécurisé ? On est censé montrer l’exemple mais on n’en sait pas assez. Je m’interroge mais il y a encore trop d’incertitudes…
En attendant, j’ai besoin d’être utile alors lundi je me suis porté volontaire pour faire du porte à porte et distribuer les masques fabriqués par les ATSEM.